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Les pays occidentaux reposent tous leurs espoirs sur les TIC

Des succès algériens dans le domaine des TIC, comme  Khaled Mouloudi, Nassima Berrayah, Tarik Zakaria Benmerar, Mohamed Said Karim Benmerar ; du Web, tels que Wafa Benhassine et Lamine Ghemati ; des réseaux sociaux, comme Dehia Sahmi. Ces jeunes entrepreneurs constituent de bons exemples de la capacité d’innovation et de la compétitivité de l’entrepreneuriat algérien dans le domaine du numérique.

Créée en 2012, l’entreprise Tbeznyss.com. propose une boutique en ligne permettant d’effectuer des achats à partir de chez soi et de recevoir sa commande sans déplacement. La livraison est gratuite uniquement pour les habitants d’Alger et ses environs pour l’instant. Trois modes de paiement permettent de régler ses achats : espèces à la livraison, envoi d’un chèque ou en passant par la plateforme ePAY.dz (compte virtuel prépayé).

«La création d’entreprises dans le domaine, même si toutes les conditions n’étaient pas favorables (elles ne le sont toujours pas d’ailleurs) nous permettra de bien nous préparer, d’anticiper les besoins et d’assurer une qualité de service irréprochable le jour où la vente en ligne se généralisera dans le pays. Cela requiert évidemment la mise en place au préalable de mécanismes, comme le paiement en ligne et de légiférer pour protéger le consommateur et le web-marchand, mais néanmoins cela reste un métier à apprendre et des processus à maîtriser afin de répondre au mieux aux besoins spécifiques du marché algérien », déclare Lamine Ghemati, en ajoutant que la création d’entreprises est déjà une difficulté en soi, l’absence de cadre légal et de structures adéquates également due aux pouvoirs publics n’est pas pour arranger les choses d’après lui.

«Notre génération veut aller vite et de manière efficace, sans se soucier de devoir disposer de telle ou telle copie de document légalisée ou de devoir attendre l’aval des autorités pour la moindre initiative qui servira l’intérêt général», précise Lamine Ghemati. L’autre principal frein ,selon lui, est celui de ne pouvoir disposer de produits fabriqués localement ni de pouvoir importer facilement et rapidement ce dont on a besoin. «Il ne faut pas se leurrer, nous sommes encore au Moyen Age technologique en Algérie à cause du débit offert, de l’absence de la 3G et du paiement en ligne, par exemple, alors que les pays occidentaux reposent tous leurs espoirs sur les TIC afin de sortir de la crise et de (re)créer des emplois et de la richesse. Il est exaspérant de demeurer à la traîne de tous les classements mondiaux de ce secteur (131e au dernier classement du World Economic Forum), alors que nous disposons de compétences remarquables en Algérie et aux quatre coins du globe», explique Lamine Ghemati.

Quand aux opportunités du secteur, le fondateur de Tbeznyss.com affirme qu’elles ne diffèrent pas de celles qu’on retrouve dans les pays développés, car nous pourrions suivre absolument le même cheminement. Les services à forte valeur ajoutée offerts par les entreprises technologiques, que ce soit dans le conseil, l’intégration de système, le développement, l’édition, les technologies du web ou l’infogérance représentent, selon lui, une chance pour nous de pouvoir améliorer la productivité et la compétitivité de nos entreprises et de leur qualité de service, mais surtout de pouvoir exporter notre matière grise qui rivalise avec celle des autres pays tout en étant à des coûts plus abordables.

L’enjeu est donc de taille, déclare Lamine Ghemati, selon qui la formation et l’innovation feront la différence et ça ne sert strictement à rien de limiter la créativité et la motivation des jeunes entrepreneurs créateurs de start-up par des entourloupes administratives sauf peut-être à les pousser à travailler dans d’autres contrées.

 

Source: http://elwatan.com

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Un anachronisme entre l’entreprise et l’université

Responsable d’un organisme créé récemment et chargé de suivre la trace des diplômés de l’USTHB, M. Ferroukhi fournit, dans cet entretien, quelques éléments de réponse concernant l’absence de synergie entre marché du travail et formations universitaires.

-Est-il possible, grâce à l’observatoire que vous dirigez, de situer statistiquement les orientations professionnelles des diplômés de l’USTHB ?

Notre observatoire existe depuis 2010 avec pour objectif de suivre la traçabilité de nos diplômés. L’USTHB a formé 65 000 diplômés qui sont répartis sur différents secteurs en Algérie et à l’étranger. Ce n’est pas facile de retrouver leur trace, mais c’est ce que nous essayons de faire. Mais l’observatoire à d’autres objectifs comme la réhabilitation des stages en entreprises, notamment grâce au nouveau système

-LMD, afin de permettre aux diplômés de trouver rapidement un travail après l’obtention de leur diplôme. Il y a plusieurs entreprises qui sont nos partenaires et recrutent nos diplômés à la sortie de chaque promotion. D’ailleurs, chaque année, nous organisons des sorties de promotion auxquelles assistent des entreprises. On peut citer la Seaal, Bomar Company…

On a chaque année 2500 étudiants diplômés en licence. Je ne peux pas vous donner le pourcentage de ceux qui s’insèrent dans le monde du travail, mais je peux vous dire qu’il y a un bon pourcentage de nos étudiants qui partent à l’étranger.

-Pensez-vous que le marché du travail offre aujourd’hui des opportunités adaptées aux formations qui sont dispensées par l’université ?

Pour que l’offre de travail soit adaptée, il faut justement qu’il y ait un rapprochement entre l’entreprise et l’université avant les sorties de promotion. On commence à avoir une entente entre les deux secteurs et les entreprises ont conscience que notre université forme des diplômés conformément à leur demande de recrutement, notamment les multinationales qui sont très intéressées.

-Quand on voit le pourcentage des diplômés au chômage, on est amené à penser qu’il y a davantage d’efforts à faire aussi bien par les universités que par les entreprises…

Il y a un anachronisme entre l’entreprise et l’université quand on sait par exemple que le monde de la production utilise de plus en plus des technologies de pointe et que les cours dispensés à l’université ne sont pas mis à niveau. Il faut donc une mise à niveau pour que l’université soit au diapason du monde de l’entreprise et de l’évolution de la technologie. L’entreprise veut généralement un produit fini, car elle n’a pas le temps de former et l’université en est consciente, c’est pour cela que nous essayons de dispenser la meilleure formation afin que les diplômés soient rapidement opérationnels. Il est important toutefois que l’entreprise se rapproche davantage du monde universitaire afin qu’elle fasse connaître précisément ses besoins et permettre aux universités de fournir des formations en adéquation.

Source: http://www.elwatan.com
voir aussi: http://www.pme-dz.com/developpement-de-lesprit-dentreprenariat-lusthb-implique-ses-etudiants/

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«Un entrepreneuriat de nécessité»

Rencontré en marge de la conférence virtuelle sur l’entreprenariat, Aziz Nafa, chercheur au Créad, décortique dans cet entretien les résultats de l’étude comparative sur les intentions entrepreneuriales des étudiants algériens, canadiens, français et belges. Il analyse également les facteurs expliquant la situation de l’entrepreneuriat chez les jeunes en Algérie.

-L’étude que vous avez présentée montre que les jeunes Algériens sont animés par l’esprit d’entreprendre. Ces résultats sont-ils à considérer dans l’absolu ?

L’étude consiste en un travail de recherche et de comparaison sur l’intention d’entreprendre entre les étudiants algériens, canadiens et européens (français et belges). L’objectif est de voir ce niveau d’intention et de définir les indicateurs qui expliqueraient les motivations et le comportement à l’entrepreneuriat des étudiants. Les résultats obtenus démontrent globalement que les étudiants algériens ont plus l’intention d’entreprendre que les Canadiens ou les Européens. Toutefois, il s’agit d’une analyse qui ne prend pas en compte les facteurs subjectifs, c’est-à-dire les éléments qui font partie de la personnalité de l’individu : c’est dire l’envie d’aller à la création, la culture d’entreprendre, etc.

En approfondissant l’analyse et en introduisant les indicateurs subjectifs, il ressort que les étudiants algériens ont tendance à aller vers l’entrepreneuriat non pas par envie ou culture d’entreprendre, mais parce qu’il y a un contexte socio-économique favorable. On entend par là, l’objectif fixé par les pouvoirs publics de créer un millier d’entreprises, les dispositifs d’aide à la création d’entreprise. On peut ajouter que le taux de chômage en Algérie étant le plus élevé parmi la catégorie des jeunes diplômés (21,4% en 2010). Entreprendre serait donc un moyen de trouver une place dans la société. En d’autres termes, c’est un entrepreneuriat de nécessité.

-Pourtant, on entend souvent dire que les Algériens n’ont pas la culture d’entreprendre en raison notamment d’un système d’assistanat entretenu par la rente pétrolière. Doit-on relativiser cette analyse ?

La culture d’entreprendre, soit on l’a, soit on ne l’a pas. Les enfants issus de familles de chefs d’entreprise ont par exemple cette motivation d’aller vers la création d’entreprise. Il y a une part de vrai dans ce que vous dites dans le sens où la société algérienne est «une société qui attend beaucoup de l’Etat» et surtout ces dernières 20 années, plus précisément avec les premiers plans d’accompagnement des jeunes, et après 1994 et le plan d’ajustement structurel, l’Etat a mis beaucoup de moyens pour absorber le chômage et pour accompagner les chômeurs issus de la fermeture d’usines, des privatisations.

Ces différents dispositifs ont été accompagnés par d’autres dispositifs comme l’Ansej, la CNAC au début des années 2000 pour aider les jeunes qui arrivent sur le marché du travail et qui n’ont pas forcément des débouchées. Depuis 20 ans donc, l’Etat est présent pour assister les jeunes dans la création de leurs entreprises et quelque part, ces différents dispositifs deviennent une arme à double tranchant. A la fois, on a envie d’absorber le taux de chômage et à la fois, on crée des assistés.

-La mise à niveau des salaires dans la Fonction publique et les avantages offerts par les multinationales ne favorisent-il pas, selon vous, une orientation des jeunes vers le salariat plus que vers l’entrepreneuriat ?

Cela nous renvoie à la première question qui a trait aux débouchées qu’ont les nouveaux diplômés. En premier lieu, on cherche du travail, mais les débouchées ne sont pas offertes à tout le monde, ce n’est donc pas tout le monde qui trouve du travail. Ceci amène certains de ces chômeurs à s’orienter vers des dispositifs tels que l’Ansej. Evidemment que beaucoup cherchent une place en tant que fonctionnaires avec un travail pas trop fatiguant et un salaire adéquat, mais ce n’est pas ouvert à tout le monde, là non plus.

-Aujourd’hui, on dit qu’il y a une inadéquation entre la demande du marché du travail et le type des formations qui sont dispensées à l’université. Comment expliquer cela ?

Effectivement, le monde économique absorbe parmi les diplômés et la formation universitaire et professionnelle n’est pas forcément en synergie avec ce monde économique. C’est pour cela que durant ces dernières années, notamment avec le système LMD, on a fixé l’objectif de rapprocher les deux mondes par des stages et par des formations au niveau des entreprises, de faciliter cette relation et cette synergie. C’est un moyen de créer un pôle pour permettre aux entreprises de puiser de la compétence dans les universités et aux centres de recherche de former et d’accompagner les universités et les entreprises dans leur process et leur innovation. Evidemment, le système va permettre de rapprocher le monde de l’université avec le monde économique et c’est là qu’on pourra créer des synergies productives.

Source: http://www.elwatan.com
voir aussi: http://www.pme-dz.com/developpement-de-lesprit-dentreprenariat-lusthb-implique-ses-etudiants/

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«Revoir le système des prix et des subventions pour relancer l’investissement»

L’ancien ministre des Finances, le Dr Abdelatif Benachenhou a appelé, hier, lors d’une conférence-débat au Forum d’El Moudjahid à une « révision en profondeur du système des prix et des subventions » pour escompter relancer l’investissement productif.

 

 

La révision du système des prix et des subventions touchera aussi bien le secteur concurrentiel que celui non-concurrentiel et « on peut le faire sans toucher à la paix sociale », rassure le Dr Abdelatif Benachenhou. L’ancien ministre des Finances qui avait, il y a quelques années, proposé une taxe sur le gasoil, rejetée par les parlementaires, a défendu l’idée que cela favorise de nouveau l’investissement, rappelant le cas de Naftec, entreprise de raffinage qui a cessé d’investir pendant 25 ans faute de marges suffisantes, ajoutant par là même d’autres entreprises qui mettent sur le marché des produits subventionnés comme l’Onalait ou la Sonelgaz qui fonctionnent à perte, n’étaient « les financements sur garantie de l’Etat », explique-t-il. Pour cette dernière, ce sont « 10 % des clients qui consomment les 40 % du produit » et il faut, dans ce cas là, selon lui « que les gros paient », au prix réel. En tous les cas, pour l’économiste algérien, il est sûr que l’entreprise n’investit pas quand « elle n’arrive pas à générer de la ressource ».

M. Benachenhou, qui vient d’éditer un livre sur les pays émergents, a débattu de la question de l’aptitude de l’Algérie à figurer parmi ce peloton des nouveaux acteurs de l’économie mondiale. Il commencera, d’abord, par définir, à travers une série de critères ce qu’est un pays émergent. (Afrique du Sud, Turquie, Mexique, Chili, Turquie, Inde, …) dont l’économie présente plusieurs aspects, à savoir une croissance importante, une économie diversifiée, des exportations dynamiques, sans oublier l’aspect social.

NOS IMPORTATIONS PEUVENT ÊTRE « DÉGONFLÉES » À 35 MILLIARDS DE DOLLARS
Il a expliqué, longuement, les défis qui se posent aussi à l’économie algérienne. Par-delà le renforcement du secteur des hydrocarbures qui constituent 70 % des ressources budgétaires et 98 % des recettes en devises du pays, il faut reconquérir aussi le marché intérieur. « Ce que je n’ai cessé de défendre depuis plusieurs années », dit-il, citant les secteurs où l’Algérie a des atouts. Il s’agit, bien entendu, des produits agricoles, de l’agroalimentaire qui sont « à notre portée » sans oublier d’autres créneaux tels les matériaux de construction, la pharmacie, le transport maritime très en retrait et qui « ne couvrent actuellement que 5 à 6 % des besoins … ».

Pour le Dr Benachenhou, on arrivera certainement, à travers de telles mesures à « réduire la facture des importations à 35 milliards de dollars, contre 60 milliards, actuellement, si on inclut et les marchandises et les services ».

Car, pour le conférencier, il y a, actuellement, vraiment « un problème de relance de l’investissement productif » qui se pose. Les chiffres sont là, seuls 2 % des montants alloués à l’investissement vont aux investissements propres comme la téléphonie, les matériaux de construction.

Pour le reste, 20 % vont aux équipements, 8 % à l’énergie et 5 % divers. Ce ne sont malheureusement pas des « investissements porteurs de spécialisation », affirme-t-il. En somme, conclut-il, nous faisons face et ce, « depuis 2006 à une crise de spécialisation » avec des exportations qui ont baissé en volume. Pour le pétrole, « on a une crise de volume, mais la hausse des prix (sur le marché international) a occulté cet aspect ». Contrairement au pétrole où il y a « une diversification des acheteurs » pour le gaz, « une crise de quantité et de prix » se cumule. Et pour ce produit, l’Algérie ne dispose que de quatre clients, dont seule la Turquie présente « une économie solide », selon lui, précisant que les autres, à l’instar de l’Espagne, la France et l’Italie sont « en crise de croissance avec des taux négatifs pour certains ».

 

Source: http://www.algerie360.com

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«Nos chefs d’entreprise n’ont pas l’ambition du long terme»

Le professeur Mohamed Tahar Abadlia est, depuis quelques mois, recteur de l’université Saâd Dahleb de Blida (USDB). Il a été directeur d’une unité de recherche à Boumerdes et ex-recteur de l’université Mohand Oulhadj de Bouira. Il a occupé aussi plusieurs postes dans le secteur économique : président du holding bâtiment et matériaux de construction, ainsi que celui chapeautant la réalisation et les grands travaux. Dans cet entretien, il revient sur l’interaction université secteur économique ainsi que sur le concept de création des pôles d’excellence dans les universités algériennes.

-Votre université vise l’installation de son système assurance qualité. Où en êtes-vous et quel intérêt pour le monde économique ?

Effectivement, aller vers des pôles d’excellence thématique sera mon cheval de bataille tout au long de mon mandat au niveau de cette méga université dont l’effectif des étudiants a déjà frôlé les 50 000. L’USDB, comme c’est le cas de la majorité des universités algériennes, a presque toujours évolué à l’horizontale, je fais allusion-là à l’aspect quantitatif. Notre objectif est de faire évoluer cette université à la verticale en faisant sortir des pôles d’excellence que nous allons doter de moyens adéquats. On ne peut mettre en place un système assurance-qualité que si l’université est complètement informatisée en mettant en œuvre tous les outils de l’informatique décisionnelle ou ce que l’on appelle aussi la gouvernance numérique.

A travers l’installation du système assurance-qualité, nous visons un triple objectif : asseoir un ensemble de processus et de procédés permettant d’aller vers plus de pertinence dans les résultats de la recherche et développement (R§D),  renforcer la passerelle de confiance entre le secteur économique et l’université par la promotion des pôles d’excellence et promouvoir la fonction R§D pour plus de visibilité de nos établissements du supérieur à l’échelle internationale. L’année 2013 verra le lancement d’une opération d’informatisation globale de l’USDB. 2014 constituera le début de l’évaluation et la mise en place du système assurance-qualité. En 2015, nous espérons atteindre un stade de mode de fonctionnement du système assurance-qualité qui nous permettra d’être certifiés par des organismes accrédités à l’échelle nationale.

En matière de pôle d’excellence thématique, je crois qu’il faut développer tout ce qui est stratégique au niveau national ou régional, tels que l’aérospatial, l’agro-alimentaire et la médecine vétérinaire et profiter surtout de la station expérimentale relevant de la faculté des sciences agronomiques et vétérinaires. Nous comptons aussi miser sur le transport électrique et les énergies renouvelables.

-Depuis quelques  années, les effectifs des diplômés chômeurs augmentent. Nos diplômés universitaires ne satisfont plus, peut-être, les chefs d’entreprise qui souvent recourent aux compétences extrafrontalières. Quel est votre commentaire ?

Le tissu industriel n’est pas assez développé pour absorber toute la masse de diplômés qui grossit d’une année à une autre. Ceci, d’une part, d’autre part par le fait même que nos universités évoluent à l’horizontale, cela a affecté négativement la qualité de la formation des futurs cadres. Mais aussi, ne l’oublions pas, et il s’agit-là d’une réalité dûment constatée sur le terrain, nos chefs d’entreprise, même parfois face à une compétence de grande notoriété, n’ont malheureusement pas cette ambition du long terme.

-Comment qualifiez-vous actuellement l’interaction université-secteur économique en Algérie ?

Le secteur économique ne s’implique pas assez dans la formation universitaire. En Europe, le secteur économique finance les formations. Aux USA, il y a une étroite collaboration de pointe entre l’armée et l’université quand il s’agit de développer des technologies de pointe dans le domaine du spatial, l’aviation et j’en passe. Donc, je vais faire l’effort nécessaire pour rétablir dans cette région, très riche de la Mitidja, le lien de confiance entre l’université et le secteur économique.

Il y a eu auparavant le lancement de plusieurs spécialités entre l’université et le secteur économique et qui ont constitué de vraies success story.  De son côté, l’université doit être plus agressive en cherchant des partenariats à des échelles plus étendues. Il ne faut pas que l’université reste figée dans le rôle de la formation, il faut qu’elle aille vers la conception. Je vais créer d’ailleurs une cellule de valorisation, développement et relations extérieures pour que notre université soit plus visible. Les produits chinois sont en train d’envahir notre pays. Je crois que l’enseignement du chinois devient un impératif national vu l’importance du volume d’échanges entre l’Algérie et ce pays. Quand des responsables de grandes firmes dans un pays comme l’Allemagne se rendent régulièrement en Chine pour se former, cela donne quand même matière à réfléchir. Je crois qu’il est temps de commencer à connaître le chinois en tant que langue et en tant que personne. Nous seront tôt au tard contraints de lancer des formations dans ce sens.

En ce qui concerne nos laboratoires de recherche qui sont actuellement au nombre de 32, mon message à l’égard des directeurs de labos était simple et clair : vous êtes libres, vous êtes autonomes et vous avez des budgets de fonctionnement et d’équipement. Vous allez travailler avec objectif, je veux des produits. Maintenant, si demain un industriel bien loti décide de créer un service recherche et développement (R§D), il aura toujours besoin de l’université car tout d’abord cela lui reviendra très cher et les boîtes capables de créer leurs propres services R§D se comptent sur les bouts des doigts. Créer un service R§D cela suppose aussi de la part de l’entreprise qu’elle va travailler sur le recrutement des permanents, y compris les frais d’exploitation d’un tel service. D’autre part, la multiplicité et la complexité des problèmes rencontrés in situ par les industriels font que les besoins sont multiples.

 

Source: http://www.elwatan.com

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Il faut arrêter de subventionner tous les produits importés

La facture alimentaire de l’Algérie a baissé de près de 10% durant les onze premiers mois de l’année 2012, passant de 8,98 milliards de dollars à 8,10 milliards. Ne pensez-vous pas tout de même que c’est un seuil inquiétant, d’autant plus que cette facture a plus que triplé depuis 2003 où elle atteignait 2,5 milliards de dollars ? Il faut souligner, d’abord, que cette baisse représente un gain de 800 millions de dollars. Mais, de mon point de vue, ce n’est guère significatif. Il faut savoir que la facture alimentaire a tendance à augmenter depuis une dizaine d’années. Elle a été pratiquement multipliée par trois par rapport à 2003 alors que la population n’a pas été multipliée par trois dans le même temps. Ceci dénote que l’agriculture n’arrive toujours pas satisfaire les besoins du pays. Il faut quand même noter qu’inévitablement, cette facture devait augmenter avec l’amélioration du niveau de vie et du pouvoir d’achat des Algériens, consécutivement à la hausse des salaires. Je rappelle que le gouvernement a augmenté les salaires et le pouvoir d’achat de manière inconsidérée sans tenir compte des capacités économiques du pays. Et cela se traduit, bien entendu, par l’explosion de la facture alimentaire car la plupart des catégories sociales, profitent de leurs revenus, pour améliorer leur quotidien. Cette facture alimentaire représente 19% du total des importations. C’est très important quand on sait que les exportations hors hydrocarbures ne dépassent pas 2 milliards de dollars. En clair, l’Algérie, sans le pétrole, serait incapable de payer sa facture alimentaire. C’est un véritable drame économique dans la mesure où si rien n’est fait, avec l’épuisement de nos réserves de pétrole, on ne pourra pas payer notre facture alimentaire, celle des médicaments, etc. C’est dire la vulnérabilité de l’Algérie. Malheureusement, on n’a pas encore trouvé la politique économique adéquate pour y remédier. L’autosuffisance alimentaire n’est-elle pas un objectif chimérique vu les contraintes techniques et climatiques qui plombent le secteur agricole ? L’agriculture algérienne est confrontée à des problèmes structurels. Il y a beaucoup d’aberrations. Le peu de surfaces agricoles dont dispose l’Algérie, on est en train de les bétonner comme c’est le cas de la Mitidja et d’autres plaines du pays. Cela explique la stagnation, voire même la régression de la production agricole dans notre pays de manière générale, alors que la population augmente. Ce n’est pas normal. Il y aussi le problème de la désertification ; qu’a-t-on fait pour lutter contre ce phénomène ? Absolument rien jusqu’à présent ; il n’y a pas de projet d’envergure alors qu’elle menace le pays. De même que le problème d’eau se pose avec acuité. Les quantités dont dispose l’agriculture pour avoir de bons rendements sont insuffisantes. Par ailleurs, nous n’encourageons pas les paysans algériens à produire plus, sachant que les prix auxquels ils vendent leurs produits sont dérisoires. Je vous cite un exemple : on subventionne le lait importé et on ne subventionne pas la production de lait de manière conséquente pour satisfaire, au moins en partie, nos besoins en la matière. Nous sommes devenus un pays importateur par facilité, parce qu’il y a de l’argent. S’il y a une mesure urgente à prendre pour améliorer le secteur agricole en Algérie, c’est absolument de subventionner le producteur algérien et non pas le producteur étranger. Globalement, il faut arrêter de subventionner tous les produits importés. Pendant une dizaine d’années, on a injecté des sommes astronomiques dans l’espoir de permettre un décollage du secteur. Les résultats, le moins qu’on puisse dire, sont maigres. Pensez-vous que les politiques engagées jusque-là sont inadaptées ? En effet, les pouvoirs publics ont dégagé des sommes importantes, notamment dans le cadre du programme 2009-2014 ; le secteur agricole a bénéficié de 1000 milliards de dinars mais on a l’impression que c’est le tonneau des Danaïdes. Les résultats sont très maigres. Tout le monde constate que la stratégie agricole mise en oeuvre au début des années 2000 s’est essoufflée. Je dois insister sur le fait que l’autosuffisance alimentaire est une utopie. Ce n’est pas l’objectif de l’Algérie. Ce qu’il conviendrait de faire, c’est que l’Algérie puisse dégager des excédents à l’exportation pour essayer d’équilibrer sa balance agricole et permettre à ce secteur de connaître une relance effective. Faute de quoi, nous aurons toujours les mêmes problèmes et la facture alimentaire sera toujours en hausse.

SALAH MOUHOUBI: économiste

 

Source : http://www.elwatan.com

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L’Employé, l’employeur et l’ordinateur

 Réflexion sur l’abus de l’utilisation des systèmes informatiques

L’utilisation étendue de systèmes informatiques alliant les moyens matériels comme les ordinateurs, les imprimantes et les scanners ou encore les accès internet sur les lieux de travail, fournis par l’employeur à ses salariés, conduit dans la majorité des cas à des utilisations de ces moyens à des fins personnelles. Le sujet serait anodin si cette utilisation n’intervenait pas sur les lieux du travail, en rapport avec les heures travaillées, voire en-dehors des heures de travail mais susceptible de nuire au système d’information de l’entreprise, les serveurs ayant de plus en plus tendance à être virtuels et la notion de présence au travail rendue encore plus immatérielle par l’utilisation d’outils de travail informatiques en déplacement ou au domicile du salarié.

Respect des règles d’utilisation dans le contexte de la relation de travail

Selon l’environnement du travail dont il est question, l’employeur peut tolérer l’utilisation, par l’employé, à titre personnel, de technologies de l’information et de la communication, en respectant notamment le caractère privé des informations produites, échangées ou stockées par le salarié, ce dernier veillant à ne pas nuire au système d’information et à ne pas se trouver dans une situation d’abus d’utilisation. Même si l’employeur peut tolérer que le salarié utilise à des fins personnelles les équipements informatiques mis à sa disposition dans un contexte professionnel, pour un usage professionnel, la tolérance ouvre une brèche, faisant que ledit usage n’est plus aussi exclusif. Pour éviter tout dépassement, l’employeur a tout intérêt à exercer le contrôle de cette utilisation.
Les arbitrages pour l’exercice de ce contrôle ne sont pas faciles à établir, d’une part parce qu’ils reposent souvent sur des appréciations subjectives, mais également parce que l’environnement algérien n’est pas au niveau de ce que le développement de la technologie requiert comme réglementation appropriée en la matière. En-dehors de la loi sur la cybercriminalité, les dispositifs spécifiques au contexte de la relation de travail ne sont pas définis.

En l’absence d’une loi sur l’informatique, les fichiers et les libertés, la protection des données personnelles des salariés reste un sujet sensible sans pour autant que l’absence d’une telle loi n’empêche l’employeur de fixer les règles, à faire connaître à l’employé, pour définir ce qui est admis et ce que l’employeur prend comme mesures pour éviter les situations d’abus et leurs conséquences. C’est ainsi qu’un règlement intérieur peut préciser les faits qualifiants de fautes graves en cas de dommages causés à l’intégrité des bases de données de l’employeur ou encore en cas de preuves de connexion à des sites Internet contraires à l’ordre public, aux bonnes mœurs ou délictuels, y compris les téléchargements de fichiers de même nature.

Dans le même esprit et pour éviter toute ambiguïté, l’employeur gagne à concevoir et à diffuser une charte informatique dans laquelle il définit la responsabilité de l’employé sur l’usage des ressources informatiques auxquelles il a accès, les règles de sécurité et les règles d’utilisation des matériels et des accès à Internet. En règle générale, la définition de ce qui est permis et des limites imposées au personnel doit permettre de situer, de façon claire, les points d’équilibre entre la vie privée du salarié et sa vie professionnelle, voire publique.

La mise à disposition de moyens informatiques doit être encadrée

Au-delà des interdictions à définir au sein de la charte informatique voire au règlement intérieur, certains employeurs mettent en place des outils de contrôle de la messagerie, notamment pour la détection de virus et pour l’interdiction d’accès à des sites non autorisés. En l’absence de réglementation sur la protection des données personnelles, il est toujours recommandé que le salarié soit informé de l’existence de tels outils. Si en Algérie il ne s’agit pas d’une obligation, les pays qui ont mis en place une telle réglementation imposent aux employeurs d’informer les salariés de l’existence de dispositifs permettant la collecte d’informations les concernant personnellement, ou de déclarer à des commissions nationales, établies dans le cadre de ces réglementations, le traitement automatisé de données personnelles.

En France, à titre d’exemple, l’employé doit avoir été informé au préalable quant à la mise en place de «traceurs» ainsi que sur la durée de conservation des données de connexion. Quant à l’employeur, il doit avoir informé et consulté le comité d’entreprise et avoir déposé une déclaration préalable auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), sauf si un correspondant informatique et libertés a été désigné, auquel cas la déclaration auprès de la CNIL n’est pas nécessaire.

L’encadrement est vital pour se préserver des menaces sur l’intégrité des données

Au-delà du sujet du respect des données personnelles du salarié, l’utilisation de technologies de l’information et de la communication impose à l’employeur d’avoir des procédures appropriées qui justifient la séparation entre ce qui doit être considéré comme personnel au salarié et ce qui est professionnel. Les protocoles définis dans les chartes informatiques gagnent à rappeler que l’employeur ne devrait pas avoir de limitations dans l’accès à tous types de données, qu’il s’agisse de fichiers ou de connexions Internet du salarié tant qu’ils sont de nature professionnelle, sans avoir à formaliser l’accord du salarié. Cette liberté d’accès est forcément restreinte pour les données personnelles pour autant qu’elles soient clairement identifiées en tant que tel par le salarié. Il doit en être de même pour les messages personnels adressés à partir d’un ordinateur professionnel. Quant aux connexions Internet, elles sont présumées avoir un caractère professionnel de sorte que l’employeur peut les rechercher aux fins de les identifier, même en-dehors de la présence du salarié. C’est notamment ce que la jurisprudence établit sous des juridictions hors de nos frontières.

De l’utilisation de l’Internet à titre personnel par le salarié

En pratique, c’est souvent l’employeur qui apporte la preuve des fichiers de nature personnelle, stockés en quantité importante sur tout support de sauvegarde, caractérisant un usage abusif pouvant affecter le travail confié au salarié ou de nature contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs. Il peut en être de même pour des échanges de courriers électroniques (mails) portant atteinte aux personnes, constitutifs de diffamation ou divulguant des informations confidentielles. Au plan de la preuve, le dispositif législatif algérien a l’avantage d’avoir admis l’écrit sous forme électronique au sein de son code civil en tant que preuve pour autant que son intégrité soit préservée et que son auteur soit clairement identifié. Par ailleurs, les dispositions du code pénal relatives aux atteintes aux systèmes de traitement automatisé de données sont dissuasives quant aux actions frauduleuses et gagneraient à être connues tant des salariés que des employeurs.

Samir Hadj-Ali : expert Comptable

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le Système comptable financier (SCF) et le règlement des litiges

 

En Algérie, depuis le 1er janvier 2010, la comptabilité des entreprises, des banques et des compagnies d’assurances est établie selon le principe de la prééminence de la réalité économique sur l’apparence juridique, comme le stipule l’article 6 de la loi n° 07-11 du 25 novembre 2007 portant Système comptable financier.
Et en application des dispositions de cette loi, le décret exécutif N°08-156 du 26 mai 2008 a été promulgué et a fixé comme objectif à la comptabilité de chaque entreprise la possibilité d’effectuer des comparaisons périodiques et d’apprécier l’évolution de l’entreprise dans une perspective de continuité d’activité.
En examinant les normes internationales IAS/IFRS, nous constatons que celles du nouveau Système comptable financier (SCF) algérien s’en inspirent largement.Les normes IAS/IFRS sont appliquées depuis janvier 2005 par tous les groupes de sociétés européennes cotées en bourse et se sont imposées en Europe dans un souci d’harmonisation des informations comptables à fournir aux investisseurs qui s’adressent aux différentes Bourses et d’éviter ainsi aux sociétés cotées sur plusieurs bourses de fournir des informations comptables en autant de modèles.

L’Australie, la Nouvelle-Zélande, la Russie et l’Afrique du Sud ont suivi la décision de la commission européenne, qui consiste à considérer les IAS comme les règles comptables obligatoires pour les sociétés européennes cotées en bourse et ce qui permet d’éviter que les informations soient fournies sur un modèle différent d’un pays à l’autre.

Ainsi, les normes IAS/IFRS ne sont obligatoires que pour les sociétés cotées en bourse et l’objectif visé est de présenter des informations financières aux éventuels investisseurs. Dans ce cadre, il est assigné à la comptabilité un rôle informatif permettant aux investisseurs des prises de décisions. Mais, pour établir des comptes qui permettent la détermination du patrimoine de l’entreprise, le calcul de ses bénéfices distribuables aux associés, le calcul des bases imposables et de procéder à divers contrôles, chaque pays a son propre système comptable adopté en-dehors des normes IAS/IFRS ou qui s’en approche.

En Algérie, le plan comptable national (PCN) qui s’appliquait depuis 1976, a été abrogé par l’article 42 de la loi n° 07-11 du 25 novembre 2007 et a été remplacé par le nouveau SCF entré en vigueur à partir de janvier 2010. Selon ce système, certains éléments à inscrire en comptabilité sont à évaluer à la juste valeur, à la valeur de réalisation ou à la valeur actualisée, tel qu’il est stipulé dans l’arrêté du 26 juillet 2008 du ministre des finances fixant les règles d’évaluation et de comptabilisation, le contenu et la présentation des états financiers ainsi que la nomenclature et les règles de fonctionnement des comptes.

La comptabilité ainsi tenue permet-elle d’établir un bilan qui reflète le patrimoine de l’entreprise, déterminer un bénéfice incontestable, des bases d’imposition conformes au droit fiscal et peut-on l’utiliser pour procéder à des contrôles ? Cette comptabilité peut-elle être admise en justice pour le règlement des litiges ?

En effet, pour toute entreprise, des droits et obligations naissent depuis la prise des premiers engagements de sa constitution jusqu’à sa liquidation définitive. Son patrimoine prend forme dès la présentation des apports initiaux des associés et après le commencement de son activité, se réalisent des achats, ventes, productions, encaissements, décaissements, etc. et il importe de suivre toutes ces opérations. C’est le rôle de la comptabilité. C’est une technique d’enregistrement et de classement des centaines, voire des milliers de transactions annuelles de chaque entreprise et de conservation de leurs pièces justificatives. C’est à travers la comptabilité qu’il est possible de déterminer les droits et obligations des parties en conflit, de déceler la commission de certaines infractions et de relever les preuves écrites y afférentes. Comme c’est en son sein que sont conservées les pièces justificatives de toutes les opérations de l’entreprise.

Mais, les entreprises astreintes à tenir leur comptabilité dans le respect des principes définis par l’arrêté du 26 juillet 2008 fixant les règles d’évaluation et de comptabilisation, le contenu et la présentation des états financiers ainsi que la nomenclature et les règles de fonctionnement des comptes peuvent modifier les valeurs nominales et comptables. Cette possibilité est prévue par l’article 37 de la loi n° 07-11 du 25/11/2007 et l’article 38 de cette même loi disposant que les changements d’estimations comptables sont fondés sur les changements des circonstances sur lesquelles une estimation est effectuée, une meilleure expérience ou de nouvelles informations et permettent d’obtenir et de fournir une information plus fiable.

Les éléments concernés par les changements de valeurs sont :
– les immobilisations qui sont à réévaluer chaque année ;
– les stocks ;
– les charges et produits pour lesquels un différé de paiement est obtenu ou accordé, y compris les ventes qui doivent être évaluées à leur juste valeur de la contrepartie reçue ou à recevoir à la date de la transaction.
Par ailleurs, les entreprises doivent comptabiliser les impôts différés conformément à l’arrêté d’application du système comptable financier (SCF). L’impôt différé correspond à un montant d’impôt sur les bénéfices payables ou recouvrables au cours d’exercices futurs. En cas de nouvelles informations ou de nouveaux indices, il est procédé à nouveau à d’autres changements de valeurs. Les comptabilités tenues suivant les principes du Système comptable financier aboutissent donc à l’élaboration de registres comptables ne correspondant pas aux pièces justificatives établies lors des transactions. Ce qui rendra très difficile l’accomplissement des missions de contrôle des vérificateurs de l’administration fiscale, des experts comptables, des commissaires aux comptes, etc. alors que le contrôle est l’une des raisons d’être de la comptabilité.

Aussi, les bénéfices déterminés à la fin de chaque année pourront devenir une source de conflits entre les associés vu que le montant du bénéfice résulte non pas d’opérations comptabilisées sur la base de pièces justificatives probantes, mais sur la base d’estimations de valeurs fixées par les dirigeants de l’entreprise. Et ces mêmes causes peuvent engendrer des contestations quant à la situation patrimoniale de l’entreprise établie à travers un bilan élaboré par une telle comptabilité. Cette comptabilité tenue sans observation des formalités prescrites par le code de commerce risque de ne pas être admise par les juridictions en charge des infractions économiques et financières et les juridictions en charge des litiges en matière commerciale ou fiscale.

Aux termes de l’article 4 du décret exécutif n° 08-156 du 26 mai 2008 portant application des dispositions de la loi n° 07-11, la comptabilité doit permettre d’effectuer des comparaisons périodiques et d’apprécier l’évolution de l’entreprise dans une perspective de continuité d’activité. Alors que suivant le code de commerce, la comptabilité a pour finalité de retracer de manière objective, conformément aux techniques réglementaires, l’évolution des éléments du patrimoine de l’entreprise. Ce qui a induit une divergence de taille consistant à prendre en considération, pour l’une, le transfert des avantages économiques, et pour l’autre le transfert de propriété.

En termes clairs, au bilan élaboré suivant le SCF, nous retrouvons des actifs dont la propriété n’a pas été transférée à l’entreprise.
A défaut d’admission de cette comptabilité, le secteur de la justice doit-il instituer son propre système comptable répondant à ses besoins à l’instar du secteur des finances qui, pour les besoins de l’administration fiscale, a instauré des règles consistant à établir un bilan annuel quasiment purgé de tous les changements d’estimation réalisés conformément au nouveau Système comptable financier afin d’obtenir des bases imposables conformes au Droit fiscal ?

Sarrab Larbi : commissaire aux comptes / expert judiciaire agréé

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Absentéisme et indiscipline au travail

 

les deux bêtes noires de l’industriel algérien

Au moment où le nouveau gouvernement envisage la promotion de nouveaux investissements productifs au moyen de coûteuses mesures incitatives, des milliers d’actifs industriels se meurent sous les effets conjugués de l’absentéisme, de l’indiscipline et du manque de qualification de la main-d’œuvre.
Dans certaines unités de production que nous avons visitées, les propriétaires des lieux nous ont fait montre de spectacles affligeants d’actifs en perdition, constitués de chaînes de fabrication à l’arrêt en raison de ces fléaux que les pouvoirs publics feignent d’ignorer, quand ils ne les encouragent pas en usant de mesures populistes qui surprotègent les travailleurs au détriment des employeurs. Les industriels, nous apprend un des patrons à qui nous avons rendu visite, sont de plus en plus nombreux à fermer volontairement des chaînes de fabrication, car la poursuite de l’activité n’est économiquement pas viable dans les conditions d’exploitation qui prévalent. L’absentéisme devenu monnaie courante, l’indiscipline au travail auxquels s’ajoute la sous-qualification, rendent impossibles toute velléité d’organisation des process de fabrication et d’augmentation des performances productives.

La désorganisation causée par ces fléaux sociaux qui polluent le monde industriel tire de plus en plus l’outil national de production vers le bas, au point de ne laisser aux propriétaires que l’alternative de la fermeture. Les chaînes de fabrication à l’arrêt sont de ce fait légion avec, à la clé, de nombreux emplois perdus, à l’instar de cette entreprise de la zone industrielle de Rouiba qui a procédé à la fermeture de trois sites de production qui employaient à eux seuls pas moins de 500 ouvriers. «J’ai beaucoup moins de problèmes de gestion et assurément moins de pertes financières en fermant ces chaînes de fabrication qu’en les maintenant en activité», nous affirme le patron de cette société industrielle qui, pour étayer ses propos, exhibe un document faisant état de milliers d’heures d’absences et de sanctions disciplinaires remises en cause par l’Inspection du travail.

«Quand un travailleur licencié pour indiscipline saisit la justice qui continue à fonctionner comme au temps du socialisme, il est pratiquement sûr d’obtenir gain de cause et de copieuses indemnités de licenciement. En quelques années, j’ai été injustement contraint de verser environ 20 milliards de centimes d’indemnisations. C’est intenable et les pouvoirs publics, pourtant bien conscients du problème, feignent de l’ignorer», ajoute t-il non sans amertume.

L’absentéisme, l’indiscipline et le manque de qualification de la main-d’œuvre et, à un degré moindre l’encadrement, constituent comme nous avons pu le constater sur les sites industriels visités une véritable calamité pour les chefs d’entreprise et les responsables de chaînes de fabrication qui souhaitent organiser du mieux possible les process de production.

Le gain facile encourage la fainéantise

Les travailleurs arrivent, en effet, souvent en retard lorsqu’ils ne s’absentent pas carrément sans prévenir. Les fêtes religieuses, notamment les Aïds, sont souvent l’occasion de prolongation d’absences à l’origine de fortes pertes de production. Les unités de production, qu’elles soient de statut public ou privé, sont de ce fait constamment perturbées et les articles fabriqués très souvent affectés par des défauts de fabrication qui prédestinent bon nombre d’entre eux aux rebut. Si les pertes engendrées sont prises en charge par l’Etat pour ce qui est des entreprises publiques (assainissement financiers, subventions, etc.), celles du secteur privé ne bénéficient par contre pas de ce privilège. Elles ne peuvent compter que sur elles-mêmes, leurs pertes financières tournant, comme c’est souvent le cas, à la faillite. D’où leur légitime prudence.

Les absences et l’indiscipline ne sont, par ailleurs, pas faites pour favoriser des actions de formation au profit des ouvriers manquant de qualification, ce qui, à l’évidence, maintient les entreprises industrielles algériennes dans un état de sous-compétitivité permanent. Les formations qualifiantes n’ouvrant pas droit à de substantiels gains salariaux, les ouvriers auraient tendance à ne pas les prendre au sérieux, quand ils ne prennent pas prétexte d’indispositions momentanées pour les éviter. A l’origine de l’absentéisme et de l’indiscipline au travail, tous les industriels que nous avons interrogés sont unanimes à incriminer en premier lieu le marché informel, qui permet à certains travailleurs de gagner en quelques journées ce qu’ils gagnent en un mois à l’usine. Le gain facile a perturbé la morale qui prévalait chez les travailleurs algériens avant l’avènement de ce fléau.

Ces derniers ne tiennent plus à leur travail et encore moins à leur formation comme par le passé, nous apprend un des industriels concernés, profondément convaincu que l’argent facile du «trabendo» a dévoyé l’Algérien en général et les travailleurs en particulier. Outre la concurrence déloyale que l’informel et la contrefaçon livrent aux industriels algériens, ces deux fléaux ont, en effet, la particularité de pervertir les travailleurs en les rendant moins besogneux et davantage portés sur le gain facile. Et, il n’est à l’évidence pas facile d’asseoir une économie productive et performante avec de telles tares sociales. L’absentéisme et l’indiscipline au travail étant en grande partie générés par les pratiques lucratives informelles, ce sont ces dernières que les autorités politiques algériennes devraient s’ingénier à combattre. L’intention étant ouvertement proclamée par le nouveau gouvernement, il est attendu de lui qu’il agisse fermement en s’attaquant au menu fretin, mais également aux maillons forts de la chaîne.

 

Source: El Watan

 

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Algérie, histoire d’un gâchis économique

Malgré l’énorme potentiel du pays, les gouvernements successifs n’ont pas réussi à adopter une économie basée sur la productivité qui serait profitable à la population.

Par Hakima Kernane
Au lendemain de l’indépendance, l’Algérie a fait le choix d’une économie étatisée… En 1962, le pays manquait de tout. Le pays connaissait des déficits énormes en matière de ressources financières, d’accès à l’éducation et à la santé. Les conditions de vie des Algériens étaient très rudimentaires, ce qui a conduit le gouvernement à s’engager dans une politique économique centralisée – basée sur un système socialiste et axée sur le développement du tissu industriel et le secteur agricole – afin de garantir un traitement équitable aux Algériens. Une chose est sûre, le pays a réalisé des progrès socio-économiques indéniables et des avancées notables dans la généralisation de l’accès aux soins de santé, la démocratisation de l’enseignement ainsi que la diminution de la pauvreté.

Dès 1966, des programmes de développement de l’industrie ont été lancés et poursuivis jusqu’au grand choc pétrolier de 1986. Cette période a vu naître des entreprises publiques florissantes opérant dans le secteur de l’industrie (mécanique, métallurgiques, électroniques, électrotechniques, etc.), qui ont contribué à l’augmentation de l’apport du secteur au Produit intérieur brut (PIB). L’État algérien a aussi procédé à la nationalisation des secteurs clés comme les hydrocarbures. Néanmoins, la chute brutale des revenus des hydrocarbures a eu des conséquences dramatiques. En 1989, l’Algérie était au bord de l’asphyxie financière. « La désindustrialisation des années 1980 et 1990 a entamé une chute de la croissance et gonflé la dette publique », explique l’économiste M. Bouzidi.

Le marasme économique se poursuit pendant la décennie 1990-2000, où le pays a connu une crise sans précédent : terrorisme sanglant et meurtrier, isolement diplomatique lourd à l’échelle internationale, dysfonctionnement profond au niveau des institutions ainsi que des ressources financières très limitées, voire quasi nulles. Comment remettre le pays sur pied ? Incontestablement, la priorité était le rétablissement de la sécurité intérieure. Selon Abderrahmane Mebtoul, professeur des universités en management stratégique, les années 1994-2000 étaient consacrées essentiellement à « la stabilisation politique après une décennie tragique ».

Les années 2000 à 2010 sont celles du rétablissement graduel de la sécurité et du retour progressif de la diplomatie algérienne sur la scène régionale et internationale. Au plan économique, profitant de l’augmentation du prix du pétrole, l’Algérie a commencé à se constituer des réserves de changes de plus en plus importantes. Selon M. Mebtoul, les années 2004-2009 devaient être consacrées « à la relance économique, notamment à travers une production et une exportation hors hydrocarbures ». Mais, malgré une assez forte croissance hors hydrocarbures de 5,3 %, même si cette dernière est tirée essentiellement par la dépense publique – notamment dans les domaines du BTP et de la construction –, le gouvernement n’a pas orienté sa politique économique sur la transformation structurelle profonde recommandée par les institutions internationales comme le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale (BM), ainsi que par les experts économiques et financiers algériens et étrangers.

Peut-on dire pour autant que c’est un gâchis économique ? Une chose est sûre, le bilan économique algérien est mitigé. Les gouvernements successifs du président Abdelaziz Bouteflika ont lancé d’ambitieux programmes de construction des infrastructures de base durant les deux plans quinquennaux de 2005 et de 2009. Le secteur du logement, en crise depuis des décennies, a bénéficié d’un programme de construction d’un million de logements pour lequel le gouvernement a consacré une enveloppe budgétaire de 18 milliards de dollars. Même si les chantiers sont visibles dans les grandes agglomérations, une partie de la population algérienne vit encore dans des conditions des plus rudimentaires. Pour les cinq années à venir, une enveloppe de 60 milliards de dollars sera consacrée à la construction de 2,4 millions de logements. En dépit de cela, mécontentements et clientélisme mettent un frein à une distribution plus équitable en faveur des familles les plus défavorisées, empêchant ainsi une évolution positive des conditions de vie de millions d’Algériens.

Le secteur des transports a mis en route de nombreux projets visant la modernisation et la diversification des modes de transports : tramways, téléphériques, métros, réseau ferroviaire… Ce dernier, par exemple, qui a bénéficié d’un budget de 15 milliards de dollars, n’a pas été rénové et modernisé malgré la demande du ministère de tutelle.

Les usagers mettent en cause la mauvaise gestion des gares, leur état de délabrement et la détérioration continue des voies. Certes, certains programmes ont vu le jour, comme le métro d’Alger (après trente ans d’attente et de nombreuses rallonges budgétaires), les tramways ainsi que la modernisation de certaines lignes ferroviaires à 160 km/h ont permis de faciliter les déplacements quotidiens.

Le ministère des Travaux publics a bénéficié d’un budget colossal pour la construction des routes, des rocades, des viaducs ainsi que des ouvrages d’art sur tout le territoire national. L’autoroute Est/Ouest de 927 km, considérée comme le plus grand chantier de l’Algérie contemporaine, non encore achevée mais tachée de scandales de corruption et de détournements de fonds, a nécessité des rallonges budgétaires au fil de l’avancement des travaux. Estimée au départ à 7 milliards de dollars, elle a atteint 12 milliards. Situation qui intrigue les spécialistes qui considèrent que cette réalisation est des plus coûteuses au monde (8 millions de $ au km alors que le prix est de 6 millions équipements compris). La presse algérienne a d’ailleurs largement commenté les faits de corruption et de pots-de-vin dont font l’objet de hauts responsables du ministère de tutelle, dont le secrétaire général Mohamed Benchama, le directeur du cabinet du ministre Amar Ghoul ainsi qu’un colonel du Département du renseignement et de la sûreté de l’armée (DRS).

Le secteur des ressources en eau n’est pas en reste. Il y a dix ans, la population algérienne, y compris dans la capitale, était privée d’eau courante pendant des jours… La situation a bien évolué, notamment grâce à l’octroi de 25 milliards de dollars au département d’Abdelmalek Sellal, ministre des Ressources en eau. En effet, 13 stations de dessalement d’eau de mer, des unités de traitement des eaux usées ainsi que la construction de grands barrages sont en cours de construction (dont quelques programmes déjà livrés). Malgré les avancées enregistrées dans ce secteur, de grandes négligences ont été constatées, après réalisation, dont la plus significative concerne le grand barrage de Ben Haroun, lequel menacerait, selon certains spécialistes, le secteur de la ville de l’est du pays Mila (problèmes techniques et risques de débordements).

Alors que le pays débloque d’énormes sommes pour la construction d’infrastructures de base dont il a grandement besoin, les imperfections, les négligences, les retards et les rallonges budgétaires remettent en question la crédibilité, la compétence et la rigueur de très hauts responsables politiques et économiques algériens.

Corruption et incompétence. « Nos gestionnaires sont corrompus en plus d’être incompétents. Tous les projets se font à l’aveuglette, rien n’est sérieusement étudié, ça traîne, et l’argent s’en va sans que rien ne soit réalisé, et cela dans presque tous les secteurs. Hormis le peuple, tout le monde semble trouver son compte, à tous les niveaux », affirme N. S, journaliste dans la presse écrite depuis une vingtaine d’années. De son côté, Hacène, salarié dans une entreprise d’assurance, nous dit : « Les Algériens sont très attentifs à la réalisation des infrastructures, mais comparativement aux sommes dépensées, de grands gâchis sont constatés et des imperfections sont dénoncées par la presse. Je sais que nous sommes en mesure de nous en sortir économiquement à condition que les pouvoirs publics et les citoyens se mettent réellement au travail et arrêtent de courir dernière le gain facile. »

En sortant de sa décennie noire, le pays a sollicité l’assistance des institutions de Britten Woods (BM et FMI) pour entamer des réformes structurelles lui permettant d’aller vers l’économie de marché. En 2005, un accord de coopération a été conclu avec l’Union européenne (UE), mais l’Algérie peine à avoir l’aval pour son entrée au sein de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC).

Les experts reprochent à l’Algérie le manque de transparence dans sa politique économique. La loi sur les hydrocarbures, votée en 2006 et revue en 2009, est critiquée par de nombreux spécialistes du secteur. Le ministre de l’Énergie et des Mines, Youssef Youssoufi, a clairement expliqué que cette loi ne favorise pas suffisamment les investissements souhaités par le groupe pétrolier Sonatrach.

Climat des affaires opaque. Il faut dire que malgré les appels des pouvoirs publics pour encourager l’investissement privé étranger, un climat des affaires opaque et contraignant freine l’émergence de partenariat gagnant et productif entre les opérateurs algériens et leurs partenaires étrangers. Selon la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced), les Investissements directs étrangers ont baissé de 34%, principalement à cause de la règle d’actionnariat dite « 51/49 ».

Les experts expliquent que l’Algérie a retrouvé sa souveraineté financière en 2000. Les réformes engagées par les pouvoirs publics ont permis au pays de se désendetter et d’augmenter ses réserves de change (selon les prévisions du FMI, elles ont atteint 200 milliards de dollars en 2012 alors qu’elles étaient de 176 milliards en 2011). Ces dernières sont aujourd’hui placées en bonds de trésors et/ou auprès des banques. Aussi, faut-il le signaler, les banques algériennes connaissent une situation inédite de surliquidités. Les experts financiers appellent à une utilisation plus productive des réserves financières. Le professeur Mebtoul, dans une note publiée dans la presse, explique : « Dans les autres pays, les institutions financières se recapitalisent, les banques algériennes n’arrivent pas à transformer leur capital argent en capital productif. »

Pis encore, l’État dépense sans compter. Des sommes énormes sont consacrées à la relance et à l’achat de la paix sociale (augmentation des salaires, subventions étatiques élargies à d’autres produits de consommation de base ainsi qu’une explosion de la facture des importations) sans qu’il y ait une réduction de la dépendance à la commercialisation de l’or noir. En 2012, l’État algérien vit encore le syndrome hollandais et importe tout (y compris les produits alimentaires de base), alors qu’il devrait, grâce au Plan national de développement rural et agricole (PNDRA), auquel une enveloppe de 400 milliards de dinars a été attribuée entre 2000 et 2006, être en mesure d’assurer sa sécurité alimentaire.

La politique économique algérienne est critiquée par des experts économiques, car les objectifs de développement n’ont pas été atteints. Comme le confirme l’économiste Abdelhak Lamiri lors d’une intervention dans la presse : « Par rapport aux ressources utilisées et au potentiel dont dispose le pays, nous avons lamentablement échoué dans la construction d’un développement durable. »

L’absence de stratégie se caractérise aussi par la fébrilité et les hésitations dans l’instauration des réformes structurelles. Sinon, comment expliquer le blocage des réformes de secteurs clés comme la finance, l’audiovisuel et surtout, dans l’adoption des mesures qui favoriseraient le développement de l’investissement privé algérien et étranger. Le climat des affaires, freiné par des mesures protectionnistes est contesté par les opérateurs économiques. Alors que faire pour booster les investissements hors hydrocarbures ? Comment sortir le pays de son économie de rente ?

En 2012, l’Algérie, qui enregistre une croissance volatile, dépendante des recettes des hydrocarbures, est en phase de déclin industriel, de chute importante des investissements ainsi qu’une augmentation vertigineuse des importations (une facture de 46,45 milliards de dollars en 2010 contre 9 milliards en 2000). Pourtant, le pays dispose d’un parc industriel important datant des deux premières décennies de l’indépendance (ce dernier ne contribue qu’à hauteur de 6 % du PIB contre 12 % dans les années 1980). Même s’il est presque à l’arrêt et vieillissant, il demeure, néanmoins, à la portée des pouvoirs publics de le remettre sur les rails et de le redynamiser, d’autant que l’environnement macroéconomique est presque assaini, l’endettement quasi nul et qu’il bénéficie d’une assise financière plus que confortable. « L’industrie est un vecteur important pour réussir à s’intégrer à l’économie mondiale », explique à ce propos l’économiste algérien M. Benabdellah

L’entreprenariat algérien peine à décoller… La majorité des entreprises privées algériennes ne dépassent pas le stade de petites et moyennes entreprises (PME). 700 000 PME dont 95 % d’entreprises de moins de dix personnes et un chiffre d’affaires inférieur à 200 000 euros). On note également 15 PME pour 1 000 habitants, alors la moyenne dans les pays émergents est 50 à 60 PME pour 1 000 habitants. Pis encore, le seul groupe privé algérien qui réalise plus d’un milliard de dollars de chiffres d’affaires est le groupe Cévital dont le PDG, Isaad Rebrab, dénonce le blocage dont souffre l’entreprise algérienne privée dans son expansion et la diversification de ses activités. Existe-t-il une méfiance envers l’entreprise privée ?

Afin de débattre de la situation de l’économie et d’envisager des pistes permettant son essor, un symposium réunissant des experts, des cadres ainsi que chefs d’entreprises a été organisé récemment par le Forum des chefs d’entreprises (FCE) à l’occasion de la célébration du cinquantenaire de l’indépendance. M. Réda Hamiani, le patron des patrons algériens, considère : « La rente pétrolière et la demande sociale nous mènent tout droit vers une impasse, si rien n’est fait d’ici à une vingtaine d’années pour diversifier l’économie. » De son côté, Zoubir Benhamouche, économiste et auteur de l’essai Algérie, l’impasse dresse un constat encore plus sévère : « L’économie algérienne est une économie rentière, son administration est bureaucratique, inefficace et corrompue…, les banques sont archaïques et le système d’éducation et de santé sont peu performants. »

« Diversifier les aides publiques ». Pour s’en sortir, cette même source évoque des pistes : « transformer le rôle économique de l’État, améliorer la qualité du système éducatif, couper le cordon de la rente pétrolière, diversifier la production et rationaliser les aides publiques ».

Hocine Malti, consultant pétrolier, ancien vice-président du groupe Sonatrach entre 1972 et 1975, et auteur du livre Histoire secrète du pétrole algérien, dans un entretien accordé au journal français Le Monde, a souligné : « Les membres du sérail ont accaparé la rente pétrolière et des pans entiers de l’économie, avec pour conséquence l’apparition puis l’extension de la corruption. Les luttes intestines auxquelles ils se sont livrés sont à l’origine de l’islamisme politique et de la guerre civile qui dure depuis vingt ans. »

La bureaucratie et la corruption gangrènent le développement socio-économique du pays. Les banques, par exemple, continuent de fonctionner comme des bureaux administratifs. « Lorsque la logique bureaucratique prévaut, la corruption n’est pas loin », explique l’économiste Abdelhak Lamiri au sujet des pratiques et des comportements néfastes évoluant au niveau des institutions en Algérie. Le mode de gouvernance est également ébranlé par des scandales de corruption et de détournements de fonds publics successifs. Tous les secteurs d’activités sont concernés par ces fléaux : les banques publiques ( BNA, CPA…), le groupe pétrolier public Sonatrach, l’Autoroute Est/Ouest, le secteur des ressources en eau…

Quelques sanctions ont été prononcées à l’encontre des personnes concernées, comme les principaux collaborateurs de Amar Ghoul pour le dossier de l’autoroute Est/Ouest, l’ex-PDG de Sonatrach Mohamed Meziane… Cela dit, en dépit, d’une politique de lutte contre la corruption annoncée par le président (comme la mise en œuvre de l’Office central de répression de la corruption dirigé par Abdelmalek Sayeh), la corruption prend une ampleur alarmante et entache la crédibilité des pouvoirs politiques et économiques du pays. Dans le classement annuel de Transparence International sur la perception de la corruption, l’Algérie occupait, en 2011, la 112e place sur 183 !

Le chômage des jeunes est le talon d’Achille qui déstabilise et remet en cause la crédibilité du pouvoir politique en place. La politique engagée dans ce sens n’a pas permis de le résorber, le taux officiel avoisine 10 % (alors que d’autres sources font état de 30 %). Dans un autre registre, malgré les efforts considérables consentis dans la construction d’un million et demi de logements, une grande partie de la population continue de vivre dans des conditions de pauvreté, écartée de la société et oubliée du pouvoir politique. « L’Algérie est un pays riche avec une population pauvre », résume Tarik Ghezali dans Un rêve algérien, chronique d’un changement attendu.

Selon les économistes, cette situation de mal-vie a favorisé le déploiement du commerce parallèle qui représente 40 % des activités commerciales et dont les pratiques sont désastreuses pour le pays : pas de TVA, pas de factures, travail au noir ainsi qu’absence totale de transparence dans les transactions commerciales. À ce sujet, Réda Hamiani explique que « l’informel est la solution algérienne pour lutter contre la bureaucratie ».

« À trop vouloir protéger les lobbies, les pouvoirs publics algériens risquent de plonger encore le pays dans l’instabilité pour plusieurs années. La situation de malaise, voire de rupture, entre le pouvoir – sous toutes ses formes – et une grande partie de la population, en particulier la jeunesse algérienne, engendre un risque d’implosion permanent », explique Zoubir Hamamouche.

Pour sortir de la crise, il recommande de « rendre la légitimité populaire aux institutions ». De son côté, le professeur Mebtoul déclare : « la réelle transition permettant à l’Algérie de se hisser au niveau des nations développées suppose un profond réaménagement des structures du pouvoir afin de concilier l’efficacité économique avec une profonde justice sociale ».

« L’assistanat est une maladie en Algérie, et touche tout le monde, du petit jeune sans emploi au grand responsable qui fournit peu d’efforts productifs contre un grand salaire et de grands privilèges », commente Hamid, professeur de français dans un lycée.

Selon le quotidien national El Watan, dans son édition du 16 juin 2012, 500 milliards de dollars ont été consacrées à la relance économique par les gouvernements successifs de Bouteflika depuis son élection. Une politique économique démunie de stratégie et de visibilité, qui a conduit à un échec collectif. Affaire à suivre…

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