Le déplacement des opérateurs turcs du secteur du textile en Algérie a relancé le débat sur la promotion de ce secteur qui est resté pendant des années sinistré. Une délégation d’entreprises turques constituée d’opérateurs versés dans le domaine du textile effectue une visite dans notre pays.

Cette mission économique consistera à développer des relations de partenariat dans le secteur indiqué notamment dans les segments du prêt à porter et les vêtements de sport. Malgré l’état actuel des entreprises du secteur jugé lamentable, les autorités algériennes semblent vouloir sauver de la mort un secteur frappé de plein fouet par la levée des restrictions douanières, la fin de toute forme de protection du secteur et le développement du marché informel accompagné d’un essor sans précédent de la contrefaçon. Sans poser la question à quiconque sur la situation actuelle du marché, chaque personne peut déduire que celle-ci est très déficitaire. Pas de produits locaux qui circulent sur les marchés. La production de la confection- bonneterie a été divisée par 2,5 en 10 ans et celle du textileconfection a atteint le quart de sa valeur des années 1990 ceci alors alors que les exportations vont régresser à 2 millions de dollars en 2001. Sur le plan social, c’est l’hécatombe. Le secteur ayant perdu pas moins de 80000 emplois en 20 ans. Il subsiste désormais 72 entreprises publiques produisant 20 à 25 millions de mètres linéaires/an pour un marché dont la demande globale est évaluée à 100 millions de mètres linéaires/an. Une situation qui a poussé la plupart des acteurs du secteur privé (industriels, artisans…) à se convertir dans l’importation (sociétés d’import-export) ou le commerce, les artères des villes et villages se parant de boutiques qui distribuent essentiellement des produits étrangers. En fait, plusieurs raisons, même si les analystes n’en sont pas convaincus, ont fait que ce secteur a dégringolé en Algérie. On parle d’abord de l’ouverture du marché mondial du textile, à compter du 1er janvier 2005, qui a frappé de plein fouet des entreprises algériennes publiques et privées incapables de résister à la déferlante asiatique. Ensuite, la signature de l’accord d’association entre l’Algérie et l’UE et les négociations d’adhésion ont entraîné une levée des dernières barrières sur les quotas d’exportation, désarmant ainsi des entreprises locales incapables d’abaisser leurs coûts de production au niveau de ceux des entreprises chinoises. Aussi, il y a la concurrence déloyale qui a fait que les entreprises algériennes n’ont pu faire face sans oublier l’informel et de la contrefaçon qui touchent toutes les gammes de produits. Résultats de tous cela, on s’oriente vers l’achat des vêtements à l’étranger ou on se rabat sur les produits asiatiques. C’est ainsi que les entreprises algériennes ont donc perdu leurs parts de marché au profit de la concurrence étrangère. Mais le cas n’est pas pareil pour nos voisins Marocains et Tunisiens qui ont su bénéficier de l’intérêt des investisseurs étrangers. Environ 300 unités du secteur du textile Européen ont été délocalisées au Maroc et 256 en Tunisie. Les européens ont trouvé dans ces deux pays une main d’oeuvre pas chère mais aussi des conditions d’investissement très encourageantes afin de faire face à la production chinoise qui a inondé le marché du textile depuis 2001.

Une filière motrice de l’industrie turque

La Turquie représente actuellement 4% des exportations mondiales de textile-habillement. En augmentation ces dernières années, les exportations turques de la filière ont atteint 21 milliards USD en 2010 (14,5 pour la confection, 6,5 pour le textile). Le secteur joue un rôle-clé dans les échanges extérieurs de la Turquie, représentant en 2010 quelques 18,5% des exportations totales du pays. Aujourd’hui, la filière réalise un chiffre d’affaires annuel de 30 à 35milliards USD et emploie près de 10% de la population ouvrière déclarée. L’industrie turque de la confection a bénéficié au cours des dernières années d’un environnement favorable qui lui a permis de progresser de façon significative. Elle a, en outre, joué un rôle moteur à l’égard du secteur textile en créant une demande forte pour la fabrication de semi-produits tels les fibres, fils et tissus. Cependant, depuis la libéralisation des échanges du secteur textile à partir du 1er janvier 2005 (fin de l’accord multifibres de l’OMC), la Turquie fait face à une concurrence internationale renforcée. Le secteur turc du textile (y compris le coton et les fils, fibres et tissus synthétiques, le textile de maison et l’habillement), qui représente 11% du PIB et emploie environ deux millions de personnes, est l’une des plus importantes industries du pays. Deuxième plus grand fournisseur de textile et d’habillement de l’UE après la Chine, la Turquie est aussi le huitième plus gros exportateur mondial de textile et le quatrième pour l’habillement. La valeur des exportations turques de textile est estimée à 21 milliards de dollars par an, ce qui représente 18% du total de ses exportations. En conséquence, les producteurs turcs de textile ont dû faire face, en Turquie même et sur leurs principaux marchés d’exportation, à la concurrence féroce des produits chinois à bas coûts. La concurrence d’autres producteurs de textile comme l’Inde, le Pakistan et le Bangladesh s’est également renforcée, à cause des faibles coûts de production de ces pays. Pour retrouver leur avantage compétitif, de nombreux producteurs turcs de textile/habillement se sont tournés vers la fabrication de produits innovants et à haute valeur ajoutée, tout en forgeant une notoriété de marque pour les produits textiles turcs sur les marchés mondiaux. Toutes les entreprises du secteur n’ont malheureusement pas pu choisir cette voie et leurs difficultés ont été aggravées par la crise économique de 2008/2009, qui s’est soldée par la fermeture d’environ 20% des entreprises turques du secteur pour cause de faillite ou de cessation d’activité. Toutefois, la demande augmente à nouveau depuis 2010, principalement celle de l’UE mais aussi celle du marché domestique, et les producteurs voient se gonfler leur carnet de commandes et leur chiffre d’affaires. Les exportations ont augmenté de plus de 15% l’an dernier et cette tendance s’est poursuivie en 2011, les commandes s’envolant de 20% à 30% au cours des premiers mois de l’année. L’utilisation des capacités de production a retrouvé un niveau de 80% après avoir chuté à moins de 60% pendant la crise. Globalement, l’économie turque affiche depuis la récession un fort rebond marqué par une croissance de 8,9% du PIB en 2010 et une prévision de 6% de croissance pour 2011. Stimulée par les investissements et par la demande intérieure, elle devrait continuer sur cette lancée, la consommation privée ayant fait un bond de 6,6% en 2010 grâce à un meilleur taux d’emploi, une livre turque plus forte et un faible taux d’épargne.

Une «mise» de 2 milliards de dollars

Le gouvernement algérien a décidé de consacrer pas moins de 2 milliards de dollars pour relancer le secteur du textile. Une partie de cette enveloppe sera utilisée pour racheter les dettes mirobolantes des entreprises concernées, mais aussi pour le renouvèlement de l’outil de production et la mise à niveau d’une industrie au bord du précipice. Le Trésor public prendra donc en charge la dette fiscale dont le montant dépasse les 1342 millions de Da ainsi que la dette dite d’investissements, contractée auprès de la Banque centrale d’Algérie, estimée à 2506 millions DA et le découvert bancaire enregistré auprès de la même institution financière évalué à 33039 millions de dollars. Une décision du ministère des Finances datant du 11 avril 2011 dernier entérine les mesures prises lors du Conseil des participations de l’Etat (CPE) dont la réunion s’est tenue le 6 mars dernier. Le gouvernement a décidé donc de procéder au redressement et au développement d’au moins 16 entreprises publiques du secteur du textile, entreprises de production, de commercialisation et de distribution. La fermeture des unités de Districh et de l’Enditex devrait être abandonnée. Si le gouvernement parvient à récupérer de nouveau 10% de parts de marché, il récupérera au moins 10 000 postes de travail perdus durant les vingt dernières années. Le redressement et le développement du secteur auront-ils prioritairement pour objectif de se substituer aux importations afin de satisfaire la demande interne? S’interroge t-on. Cela supposerait d’améliorer la qualité des produits tout en abaissant leur coût de production. Certains spécialistes du secteur, se disent sceptiques suite à l’annonce du groupe public Sonatrach qui compte en effet développer un complexe de production de la matière première entrant dans la fabrication de fibres synthétiques. Mais aucune indication sur les délais de construction de ce complexe n’est avancée.