Les prix du pétrole se maintiennent sur une courbe ascendante, après un gain de plus de 6% enregistré lundi, suite à la décision inattendue annoncée par neuf membres de l’OPEP+, dont l’Arabie Saoudite et la Russie, de mettre en œuvre des réductions volontaires de production à hauteur de 1,16 million de bpj à partir de mai et jusqu’à fin 2023. La décision a secoué les marchés qui tablaient sur la reconduction de la stratégie de l’alliance jusqu’à la fin de l’année. 
Hier, les contrats à terme sur le Brent se négociaient au-dessus de 84 dollars le baril. Le brut américain West Texas Intermediate oscillait entre 80 et 81 dollars le baril. Les prix de l’or noir évoluaient au rythme des prévisions des spéculations sur les perspectives économiques, les attentes de baisse des stocks de brut américain et des répercussions des plans de production annoncés par l’OPEP+.
La décision de l’Opep+ de couper certains de ses approvisionnements porte désormais le volume total des réductions par l’OPEP+ à 3,66 millions de bpj, dont une réduction de 2 millions de barils en octobre dernier, soit environ 3,7% de la demande mondiale. Les restrictions de production de l’alliance ont conduit la plupart des analystes à relever leurs prévisions de prix du pétrole Brent à environ 100 dollars le baril d’ici la fin de l’année. A titre d’exemple, Goldman Sachs a relevé ses prévisions pour le Brent à 95 dollars le baril d’ici la fin de cette année et à 100 dollars pour 2024. 
Alors que nombre de spéculations ciblent la sortie inattendue de l’Opep+, inspirées notamment par des positions occidentales hostiles, la 48e réunion du Comité ministériel conjoint de suivi (JMMC) a noté qu’il s’agit d’«une mesure de précaution visant à soutenir la stabilité du marché pétrolier». 
La réunion, qui s’est déroulée par visioconférence lundi, au lendemain de l’annonce des nouvelles coupes de production volontaires, et à la quelle a pris part le ministre de l’Energie, Mohamed Arkab, a annoncé avoir pris note de l’ajustement volontaire suivant de la production, annoncé le 2 avril 2023 par l’Arabie Saoudite (500 000 b/j) ; l’Irak (211 000 b/j) ; les Emirats arabes unis (144 000 b/j) ; le Koweït (128 000 b/j) ; Kazakhstan (78 000 b/j) ; Algérie (48 000 b/j) ; Oman (40 000 b/j) et le Gabon (8000 b/j) de mai à fin 2023. 
Ceux-ci s’ajouteront aux ajustements de production décidés lors de la 33e réunion ministérielle OPEP et non-OPEP. «Ce qui précède s’ajoutera à l’ajustement volontaire annoncé par la Fédération de Russie de 500 000 barils par jour jusqu’à la fin de 2023, qui proviendra des niveaux de production moyens, tels qu’évalués par les sources secondaires pour le mois de février 2023», avait précisé l’Opep+. 
Le ministre de l’Energie et des Mines, Mohamed Arkab, a indiqué, pour sa part, à l’issue de la réunion, que «malgré des signaux positifs en provenance de Chine, les conditions du marché appellent à la prudence. Les incertitudes autour de la croissance économique mondiale pourraient conduire à un ralentissement de la demande de pétrole. Le marché pétrolier est largement approvisionné alors que les stocks commerciaux sont revenus à leur plus haut niveau depuis deux ans». 
Hostilité occidentale et spéculations sur les motivations de l’Opep+
Par ailleurs les analystes, souvent acquis aux arguments des pays consommateurs, spéculent sur les raisons qui ont amené l’Opep+ à réduire sa production sans avis préalable. Il s’agirait de préoccupations concernant la faible demande mondiale, les craintes d’une récession mondiale et les interférences avec la dynamique du marché causée par la crise bancaire récente, qui a fortement impacté les prix du pétrole. 
L’Opep+ viserait aussi, selon les nombreuses thèses que véhiculent les analystes du marché pétrolier, «à punir également les spéculateurs ou ceux qui parient sur la baisse des prix du pétrole». De nombreux analystes ont déclaré en outre que l’OPEP+ souhaitait mettre un plancher sous les prix du pétrole à 80 dollars le baril, tandis qu’UBS et Rystad prévoyaient un retour à 100 dollars. 
Les pays occidentaux ont critiqué, à plusieurs reprises, l’OPEP+ pour ses positions et le parti pris pour la Russie malgré la guerre en Ukraine.  
L’OPEP+ a blâmé, pour sa part, l’Agence internationale de l’énergie (AIE), dont les Etats-Unis sont le plus grand donateur, pour avoir libéré les stocks de pétrole l’année dernière, une décision qui, selon elle, était nécessaire pour faire baisser les prix, craignant que les sanctions ne perturbent l’approvisionnement russe. 
La prédiction de l’AIE ne s’est cependant jamais concrétisée, ce qui a incité des sources de l’OPEP+ à dire qu’elle était politiquement motivée et conçue pour aider à améliorer les notes du président américain Joe Biden, note Reuters.
 L’administration Biden a montré d’ailleurs, encore une fois, son hostilité aux décisions de l’Opep+ suite à l’annonce de la réduction volontaire de production, en déclarant aux responsables saoudiens qu’elle n’était pas d’accord avec la décision, estimant qu’elle nuirait à l’économie mondiale.